2013-06-12 : Suisse: l'utopie d'une rente à vie de 2500 CHF
Le principe d'un « salaire d'existence » fait son chemin. Voilà que des citoyens suisses se sont mobilisés pour que soit organisé un référendum pour décider de l'établissement d'une pension de 2500 Francs Suisses (environ 2080€) attribuable sans condition à tous les citoyens suisses. Et ce afin que personne ne soit plus contraint d'accepter un travail qui lui déplait par nécessité financière, tout un chacun pouvant mener une existence « modeste » sans travailler grâce à cette pension universelle. On appréciera le « modeste » au vu du montant, mais il est vrai que le coût de la vie est Suisse n'est pas le même qu'en France.
Que voilà un projet généreux, mais que voilà une utopie insensée ! On peut prédire une faillite rapide de la Suisse s'il était adopté, non tant à cause du coût direct estimé de la mesure qu'à cause du fait que bien des tâches ingrates ne trouveraient plus preneurs, sinon par des immigrés venus faire ce que les Suisses ne voudraient plus faire. C'est à peu près ce qui se passe en Arabie Saoudite et autres Emirats du Golfe, et on voit bien que c'est un système juste bon à instaurer une caste des citoyens dirigeants, une caste des citoyens parasites, et une caste d'immigrés venant faire le sale boulot. Et surtout, on voit bien que ce système n'est rendu possible que par la manne financière du pétrole.
Et pourtant, j'ai argumenté dans les pages de Respect et Vérité en faveur d'un système de pension universelle sans condition. Mais avec d'importantes nuances.
D'abord dans le montant qui n'avait rien à voir avec ce qui est proposé par ce projet Suisse, montant qui dans mon idée doit juste permettre une survie digne afin que nul ne meure de faim, laissant donc une forte incitation à travailler même à des tâches qui ne nous enchantent pas. Et surtout, mon projet va de paire avec un travail du à la collectivité en compensation de ce que l'individu en reçoit. Travail qui pourra être de faire justement des tâches peu attractives mais nécessaires au bon fonctionnement de l'ensemble de la société.
Il est clair que notre système actuel d'allocations diverses et biaisées est à réformer. Et, comme le pointe le projet Suisse, une pension sans condition permet une simplification administrative considérable, ce qui est l'un des axes que j'ai développé afin d'alléger le poids pesant sur les élans créateurs. Mais simplifier à la légère comme dans ce projet Suisse stimulera bien davantage l'indolence et le parasitisme que les forces créatrices. Nous avons ici l'exemple même d'une réforme qui ne peut être constructive que si l'on considère la question dans son ensemble et en l'inscrivant dans une remise à plat globale du fonctionnement de la solidarité dans la société. En l'état, en ne s'adressant qu'à un seul aspect de la question, c'est la catastrophe assurée.
Gageons que le bon sens des Suisses ne cèdera pas aux sirènes tentatrices de cette facilité sournoise.
Philippe Granger