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 RESPECT ET VERITE
Ch.10: Santé et Sécurité Sociale

10 : santé et sécurité sociale

Quidam :
J'ai souvenir d'un James Bond qui avait pour titre « Vivre et laisser mourir ». Il semble bien s'accorder avec votre point de vue.

PG :
Si on veut, mais avec une grosse nuance : laisser mourir quand c'est l'ordre naturel des choses. Pas d'acharnement thérapeutique mais pas de négligence pour autant. L'objectif est de se concentrer sur l'amélioration de la vie, pas de lutter à tout prix contre la mort. Il en résulte bien souvent que la mort est effectivement repoussée. Mais ce n'est qu'une conséquence de l'effort collectif pour améliorer l'existence en sécurisant la santé grâce à une réponse adaptée à la maladie ou aux accidents. Ce n'est pas un objectif en soi. Si le résultat est souvent le même, il découle d'une attitude différente, plus responsable, motivée par le respect de la vie et non par la peur de la mort.
Vous avez une incapacité temporaire à travailler, voire à vous prendre en charge, ou même à vous nourrir, parce que vous êtes malade ou blessé ? Pas d'inquiétude : la collectivité ne vous laisse pas tomber et vous assiste pour passer ce cap difficile. Nous sommes en plein dans la réponse au besoin de sécurité, le deuxième niveau de la pyramide de Maslow. Au lieu de mourir de faim tout seul parce que votre jambe cassée vous empêche de travailler et de vous procurer à manger, l'aide apportée par le collectif permet de passer le cap de cette douloureuse expérience et de poursuivre votre existence.

Quidam :
Mais si c'est plus grave qu'un bras cassé ? Et que l'invalidité n'est pas que temporaire ? Si c'est un handicap permanent, qu'il soit de naissance, ou suite à un accident ou une maladie ? Et que c'est un handicap vraiment lourd et sans réelles perspectives d'amélioration ? Ne préconisez-vous pas l'euthanasie ?

PG :
La question s'aborde de la même façon, ou presque. Pour quelqu'un qui, comme moi, croit qu'il y a bien plus dans l'existence que la simple vie du corps, mais qui reconnaît avant tout mon absence de certitudes concernant ce domaine occulte, je ne peux que me ranger à la sagesse du fameux précepte : « il ne faut pas juger ». Simplement parce que nous ne savons pas. Croire n'est pas savoir. Quoique je croie, je ne sais pas si dans ce corps grabataire, l'âme vit une expérience qui lui est utile ou pas. Dès lors, je suis porté à distinguer la grande dépendance venue progressivement du fait du grand âge au terme d'une longue vie, de celle arrivée plus tôt dans l'existence, subitement ou pas. Dans le premier cas, je réaffirme qu'il faut savoir partir le moment venu, dans le second, je ne peux écarter les considérations occultes spirituelles. Et l'une de ces considérations est aussi que ce sont de formidables occasions pour l'entourage de développer le don de soi et l'amour inconditionnel.
Un handicapé lourd conscient dispose donc du même droit que tout un chacun à disposer de sa vie et de sa mort. Sauf que dans son cas, sa décision impacte aussi l'existence de son entourage puisqu'il ne peut s'assumer et dépend de la bonne volonté d'autrui pour la survie au quotidien. Alors si autrui ne se résout pas à un sacrifice personnel si important, et que la personne concernée veut néanmoins poursuivre son expérience de vie, il reste la possibilité de centres spécialisés. Même si on sait bien que certains s'y trouveront abandonnés, sans lien affectif autre que celui proposé par les salariés en charge de s'occuper d'eux.
Mais dans le cas d'un grabataire inconscient et abandonné, donc dont les responsables légaux se refusent à demander l'euthanasie sans pour autant assumer cet asservissement au moins partiel de leur vie à la grande dépendance de ce proche, il est clair que la société peut être amenée, à un moment donné et dans certains cas, à trancher. Et à plus forte raison s'il n'y a aucun proche pour prendre une décision.

Quidam :
Ca risque de faire scandale.

PG :
Pas plus que pour une personne très âgée ou pour un comateux longue durée. C'est l'affectivité et l'émotivité qui vous fait considérer les choses différemment. Un jeune handicapé moteur, ça incite davantage à s'apitoyer qu'un vieux gâteux impotent, incontinent et atteint d'Alzheimer. Et pourtant, objectivement, la situation n'est pas fondamentalement différente.
Mais à défaut de proches, et pour éviter les cas de gens qui n'intéressent plus personne sinon ceux dont c'est le métier, la porte est ouverte pour que des bénévoles puissent assurer une présence humaine auprès de ces personnes. On trouve toujours des gens prêts à se lancer dans tout un tas de causes plus ou moins justifiées, simplement pour le besoin de se chercher une utilité. C'est un processus normal de la recherche de valorisation. On voit, par exemple, des gens se mobiliser contre la condamnation à mort par lapidation d'une iranienne accusée d'avoir assassiné son mari, mais sans pour autant se mobiliser à l'identique contre la peine de mort dans certains états des USA. Il semble que l'injection ou la chaise électrique soient plus acceptables à leurs yeux que le jet de pierres. Entre effets de mode et émotivité, tout le monde ne fait pas toujours preuve de la pondération et du discernement qui seraient souhaitables pour favoriser une action juste. Alors que, sans aller se mêler de ce qui se passe dans d'autres pays, faire du bénévolat à proximité pour assurer une présence humaine bienveillante auprès de tels handicapés profonds relève clairement d'une action juste, et d'une très bonne façon de satisfaire son légitime besoin d'être utile. Voire, si la compassion se développe suffisamment, de s'approcher d'un accomplissement personnel.

Quidam :
La question des moyens demeure quand même essentielle. Avec des infirmiers et des aides-soignants à domicile, des subventions pour les appareils spécifiques, etc., la charge pour les proches est tout de même nettement plus limitée. Et davantage de grands handicapés pourraient être gardés chez eux plutôt que placés en centres. Est-il acceptable de réduire ces questions de vie humaine à des questions d'argent ?

PG :
Je ne réduis certainement pas la question à ça, puisque j'ai insisté sur la dimension profondément humaine de ces situations, voire leurs implications spirituelles. Et notamment le fait que ce sont d'exceptionnelles opportunités de développer sa capacité d'amour et de don de soi. Mais cela relève du domaine personnel. Du point de vue collectif de la société, nous ne pouvons pour autant faire l'autruche et occulter la réalité financière. Il est indéniable que le poids sur l'existence des proches varie selon les moyens que la société peut consacrer à les aider. Or ces moyens sont limités et il faut partager aussi avec les biens-portants qui ont d'autres besoins. Le handicap appelle une aide, il ne confère pas de privilèges. Et ce principe s'applique également à toutes les autres problématiques d'exclusion, quelles qu'en soit les racines.
Au passage, votre remarque est assez symptomatique du conditionnement « bien- pensant ». Alors je vais simplement vous reposer à peu près la même question que tout à l'heure : êtes-vous prêt à sacrifier vos vacances annuelles en famille pour payer le supplément d'impôts qui permettra d'assurer « toute » l'aide nécessaire à l'accompagnement des handicaps lourds ? Non ? En fait, c'est une question de savoir combien ça va réellement vous coûter. Si c'est quelques cocktails en moins au bord de la piscine du club de vacances, ça ira probablement. Si c'est partir en camping dans votre jardin au lieu d'une croisière sur le Nil, votre réponse risque d'être différente. Lorsqu'il y a proportionnellement peu de cas à prendre en charge par la collectivité, le coût pesant sur chacun reste limité et acceptable. S'il y en a trop, ça ne l'est plus.

Quidam :
Mais alors, comment définir « trop » ?

PG :
Quand les ressources nécessaires ne sont plus suffisantes, tant de par les choix faits par la société que de par les choix personnels des contribuables, le trop est atteint.
Trop est une notion totalement relative. Si les valeurs de la société sont axées sur l'individualisme et le loisir tout en privilégiant d'autres domaines d'utilisation des ressources collectives, il en faut peu pour arriver à trop. Si elles sont basées sur l'aide à autrui, le bénévolat, l'acceptation de contributions élevées pour un service maximum envers la dépendance, il faudra beaucoup avant d'en être à trop. Mais si la société continue de regarder sans rien faire les jeunes dégrader leurs testicules et leurs ovaires à coup d'irradiation par les téléphones portables stockés dans leur poche, ou qu'elle continue à laisser notre patrimoine génétique être attaqué par une alimentation de plus en plus empoisonnée et un environnement de plus en plus toxique, nous nous préparons à un afflux de bébés mal formés qui risque de rapidement nous propulser bien au-delà de la limite du trop.

Quidam :
Vous croyez vraiment que nous risquons d'en arriver là un jour ?

PG :
Il semble qu'au Viêt-Nam, trente-cinq ans après la fin de la guerre, les taux de malformation à la naissance soient encore trois à quatre cent fois supérieurs à la moyenne mondiale, du fait de tous les produits déversés par les américains pendant leurs dix ans de lutte contre le Vietminh et qui ont durablement pollué ce magnifique pays. A Bhopal, en Inde, les malformations de nouveau-nés sont également monnaie courante depuis le désastre de Union Carbyde en 1984. Alors avec le rythme de pollution globale accélérée de notre environnement, cette situation ne peut que se propager progressivement mais sûrement. Quant aux médecins ukrainiens de la région entourant Tchernobyl, ils sont régulièrement confrontés à cette problématique de devoir euthanasier des nouveau-nés relativement monstrueux.

Quidam :
Il parait, oui, mais nous n'en sommes pas là en France.

PG :
Oh, avec la banalisation de l'incorporation de déchets radioactifs dans les biens de consommation et les matériaux de construction, nous risquons de nous en rapprocher plus vite que nous ne pouvons le penser. Les iraquiens, dont l'environnement a été généreusement contaminé par l'usage de munitions à l'uranium supposément appauvri, nous donnerons bientôt un aperçu de ce qui nous attend. Nous jouons à ce niveau avec des choses que nous ne maîtrisons absolument pas.
Mais même sans ça, ce sujet mérite considération. Pour le simple fait qu'il interpelle notre conscience et nous force à interroger et approfondir notre conception de l'existence. Cependant, au-delà des valeurs et considérations spirituelles personnelles, il y a indéniablement un impact social à prendre en compte. Nous sommes dans un monde matériel fini, avec des ressources limitées. La société résulte donc de choix. Et on retrouve notre ami Pareto pour dire que si on enlève des ressources à l'entretien des routes pour améliorer l'assistance aux handicapés lourds, ce n'est pas une amélioration, mais un choix. Si un jour nous parvenons à vivre dans un paradis d'abondance illimitée, la question des choix se posera différemment. Mais pour le moment, une société doit gérer ses priorités. L'aide aux personnes dans l'adversité fait partie de ces priorités puisque ça répond au besoin fondamental de sécurité, mais avec les limites qu'impose la bonne gestion aussi de tout un tas d'autres priorités pour la préservation de l'intérêt commun. On ne peut asservir tout le monde aux intérêts de quelques uns. Et cela vaut aussi bien pour la prise en charge des handicapés lourds que pour la maximisation du profit des grands argentiers de la planète, qui ne sont finalement que des handicapés de la conscience.
Toute la difficulté de la vie consiste à trouver en toute chose, y compris dans ce cas délicat, la juste mesure.

Quidam :
A l'heure où on ne parle que du déficit de la sécurité sociale, où est la juste mesure en matière de prise en charge médicale ?

PG :
La juste mesure voudrait qu'on se préoccupe davantage de santé que de maladie. Or on constate qu'il y a tout un système extrêmement coûteux pour tenter de soigner la maladie, mais que pour éviter de tomber malade, il n'y a guère d'effort. Inconséquence des politiques qui favorisent le profit immédiat au détriment du principe de précaution ? Ou déresponsabilisation des individus vis-à-vis de leur propre santé ? Forcément les deux.
De nombreuses voix s'inquiètent des risques pour la santé humaine de toute la pollution électromagnétique, et pas seulement celle engendrée par les antennes-relais de téléphonie portable, mais le gouvernement préfère encourager la recherche contre le cancer du cerveau qui risque d'en découler plutôt que de prévenir le risque. De même, des études indépendantes démontrent que les aliments OGM sont loin d'être aussi inoffensifs que veulent nous le faire croire ceux qui les vendent, mais là encore, la volonté politique ne semble guère préoccupée d'appliquer le principe de précaution pour protéger la population.
Les philosophies orientales ont une petite histoire qui illustre bien ce principe du mieux vaut prévenir que guérir :
Un homme qui sait nager et un qui ne sait pas arrivent au bord d'une rivière. Ils aperçoivent quelqu'un qui dérive dans le courant, en train de se noyer. L'homme qui sait nager plonge et le sauve. Mais voilà qu'un autre dérive, aussi en train de se noyer. L'homme qui sait nager replonge, et le sauve également. Puis un troisième dérive, et l'homme le sauve également. Mais en arrive un quatrième. L'homme qui sait nager ne plonge pas et commence à remonter la rivière. L'homme qui ne sait pas nager l'interpelle : « Mais, vas-tu le laisser se noyer » ? Alors l'homme qui sait nager lui répond : « je ne vais pas pouvoir continuer à les sauver tous encore bien longtemps ; je crois qu'il est plus urgent d'aller voir en amont pourquoi tant de gens tombent à l'eau » !
Bon évidemment, si l'homme qui ne sait pas nager avait un peu plus de jugeote, il serait allé lui-même à la recherche du problème en amont de la rivière, pendant que son collègue aurait continué à sauver les gens qui se noient. Mais bon. L'intérêt de cette histoire est d'illustrer le fait qu'il est plus important de solutionner la cause que de chercher à traiter les conséquences. Or tout le système de soins officiel, la médecine dite allopathique, est basé sur le traitement des symptômes, pas celui des causes. C'est pourquoi je dis que ce n'est pas une politique de santé mais une politique de maladie.
Il en va d'ailleurs de même de l'essentiel des actions humanitaires de par le monde. Les ONG apportent du riz aux affamés, parfois se préoccupent de leur apprendre à creuser des puits pour relancer leur agriculture, ce qui est beaucoup mieux, mais les causes politiques et de surpopulation qui engendrent ces situations de misère et de famine récurrentes, celles-là, elles ne sont pas franchement traitées. Alors l'extrême misère perdure au lieu d'avoir été éradiquée depuis longtemps.
Un proverbe chinois dit : « si un homme à faim, ne lui donne pas ton poisson, apprends lui à pêcher ». C'est uniquement cette démarche-là qui peut être constructive sur le long terme. Et puis n'est-il pas infiniment plus gratifiant d'avoir aidé quelqu'un à atteindre l'autonomie que de le maintenir dans une survie dépendante ? C'est toute la différence qu'il y a entre s'accomplir dans le cinquième niveau de besoin de Maslow, et n'en être qu'à la recherche de reconnaissance superficielle du quatrième niveau.

Quidam :
Ce n'est pas faux. C'est une autre approche de ce même problème dont nous avons déjà parlé en discutant de l'immigration.
Mais pour en revenir à notre système de santé, qu'est-ce qu'il faudrait changer selon vous ?

PG :
La médecine allopathique ne traite que les conséquences. Vous avez de la fièvre ? On vous donne un médicament contre la fièvre. Mais la cause de cette fièvre ? Une grippe ? On vous rajoute un antibiotique. Mais le pourquoi vous avez attrapé la grippe, là, c'est le silence. On vous dit que c'est à cause d'un virus. On vous propose un vaccin. Mais pourquoi avez-vous été contaminé par ce virus alors que votre voisin ne l'a pas été, là, pas de réponse.
Au passage, on s'aperçoit qu'à force de balancer des antibiotiques à tout bout de champ les maladies deviennent plus résistantes, ce qui semblait relativement évident. On s'aperçoit que le vaccin prétend vous protéger contre la grippe, peut-être, sans réelle certitude, alors que des études semblent pointer du doigt une corrélation entre le développement des cas d'autisme et d'Alzheimer et le développement de la vaccination, sans parler de risques d'effets secondaires parfois clairement établis telle la sclérose en plaque suite à certains vaccins contre l'hépatite dans les années 70.
La médecine officielle, celle qui est défendue bec et ongle par l'ordre des médecins et les lobbies pharmaceutiques, écarte tout ça d'un revers de main aussi longtemps qu'elle le peut, enfermée dans le dogmatisme étroit de leur ordre et la quête du profit des laboratoires. Mais petit à petit, les pouvoirs publics commencent à prendre conscience de certaines choses qui semblent du bon sens.

Quidam :
Comme « les antibiotiques, c'est pas automatique » ?

PG :
Par exemple. Mais il a fallu le déficit chronique de la sécu et la recherche de sources d'économies pour en arriver à des slogans de ce type. Ce même déficit qui donne d'ailleurs des arguments à l'ordre des médecins pour ériger des barrières contre les médecines alternatives et les innovations thérapeutiques. Rendez-vous compte, tous ces charlatans qui prétendent vous guérir avec des produits naturels non brevetés, voire, pire, sans rien. Quel sacrilège !
Or si votre médecin n'arrive pas à vous guérir, n'est-il pas tout autant charlatan que le marabout local qui n'y arrive pas non plus ? Est-ce la méthode qui définit le charlatanisme, ou l'absence de résultat ?
Des thérapeutes ont annoncé avoir vaincu le cancer. Hammer, Beljanski, et d'autres. Ils ont été pourchassés par l'ordre des médecins, à travers différents pays, comme aux plus belles heures de l'inquisition. Mais moi, citoyen lambda, ce que j'attends de la société, ce n'est pas de protéger les intérêts de la mafia médicale. C'est d'assurer une exploration scientifique, c'est à dire ouverte et sans préjugé, de toutes les voies thérapeutiques nouvelles qui pourraient se présenter. Si les méthodes Hammer ou Beljanski sont mauvaises, ça doit se prouver en étudiant cliniquement et publiquement leurs résultats, pas en les mettant en prison. Et si elles sont bonnes, il faut remballer les vendeurs de chimiothérapies.
Plus probablement, la santé n'étant pas une science exacte mais à adapter à chaque cas, différentes méthodes seront bonnes ou mauvaises selon les patients. Il semblerait que Pasteur, cet icône de la vaccination dont il n'est d'ailleurs pas si sûr qu'il fut ce qu'en retient la légende et contre lequel s'élèvent certaines voix qu'il faut aussi savoir prendre en compte tant il est vrai que la contradiction est un moteur de progrès, aurait reconnu à la fin de sa vie que Claude Bernard avait raison : « le virus n'est rien, le terrain est tout ». Mais qui se préoccupe du « terrain » spécifique à chaque patient dans notre médecine officielle ? Ce sont plutôt les médecines alternatives qui s'en soucient de ce terrain.
Alors il ne faut pas jeter les bonnes choses sans discernement. La médecine moderne est très performante, et probablement irremplaçable, dans le domaine des urgences, où il s'agit de traiter très rapidement des problèmes mécaniques graves du corps. Mais ce n'est pas une raison, dans le suivi médical à long terme de la santé d'un individu, d'écarter les apports de la médecine alternative. Il faut en finir avec le sectarisme médical. Certains réagissent très bien à l'homéopathie, d'autres ce sera plutôt à l'acupuncture, d'autres encore ont une composante psychosomatique très forte et réagiront mieux à la sophrologie, ou à l'hypnose, tandis que d'autres encore auront besoin d'un remède de cheval bien chimique pour résoudre un problème, etc. Les gens doivent avoir le choix et le droit de chercher ce qui est le mieux pour eux.

Quidam :
Mais alors si vous voulez rembourser tout ça, ce n'est un plus trou qu'aura la sécu, mais un gouffre.

PG :
C'est déjà un gouffre qui mine la branche maladie de la sécurité sociale. Et il menace très directement un des piliers de notre société : le droit aux soins, indépendamment de leurs coûts. Mais nous y reviendrons.
Non, je ne pense pas qu'il faille tout rembourser. Ce serait déresponsabilisant. Et les gens doivent au contraire reprendre leur responsabilité sur leur santé au lieu de s'en défausser sur leur médecin et se plaindre qu'ils sont malades. Et si certains sont motivés à explorer des méthodes alternatives, s'assurer que c'est fait en pleine connaissance de cause est légitime, mais lancer des chasses aux sorcières inquisitoriales pour exercice illégal de la médecine afin de préserver une corporation de diplômés ne l'est pas.
Entre tout rembourser et exclure tout ce qui n'est pas allopathique, il y a une juste mesure à trouver. Et qui dépend aussi, encore et toujours, des moyens que la société peut et veut allouer à cette question. Certaines techniques seront reconnues et intégrées au remboursement de la Sécurité Sociale, d'autres non. En fonction de ce simple critère, les gens sauront s'ils s'engagent sur une voie officiellement reconnue ou sur une piste alternative, à leurs risques et périls en quelque sorte.
Une chose est sûre toutefois, il ne peut être laissé un chèque en blanc aux médecins pour faire ce qu'ils veulent. Du moment qu'il y a remboursement, il doit y avoir contrôle, et aussi bien du diagnostic que du traitement. Ceux qui veulent invoquer le fameux secret médical pour justifier de leur revendication à faire ce qu'ils veulent sans rendre de compte, ce qui est surtout pratique pour masquer leurs échecs voire leur incompétence, devront apprendre à pratiquer hors du circuit reconnu par la sécurité sociale, et à se passer de remboursements. Ils pourront utilement s'informer auprès de leurs collègues des médecines alternatives sur le pour et le contre de cette situation. Les médecins doivent donc motiver et expliquer leurs décisions à l'organisme qui les paye. S'ils prescrivent tel ou tel examen coûteux, il faut qu'ils puissent le justifier autrement que par le simple souci de vérifier « à tout hasard ». Certes, le principe de précaution s'applique aussi à ce niveau, mais il ne peut non plus justifier tous les excès. Juste mesure, encore et toujours.

Quidam :
Là, vous pouvez vous attendre à une levée de bouclier de la part des médecins.

PG :
Forcément. Mais si personne n'est prêt à se remettre en cause, autant abandonner immédiatement l'espoir de faire évoluer la société et attendre qu'elle s'effondre pour que les gens commencent à réfléchir. La médecine doit se remettre en cause. Ne serait-ce que parce que plus elle progresse, plus nous sommes malades. Si ce n'est pas signe qu'il y a quelque chose qui ne va pas…
Et ce qui ne va pas, c'est certes l'optique trop matérialiste de la médecine officielle, mais aussi les lacunes de la politique de santé du gouvernement. A force d'imposer des normes de sécurité alimentaire de plus en plus draconiennes pour éviter, une fois de temps en temps, un décès par intoxication, c'est la population entière qui est devenue immunodéficiente et qui tombe malade au moindre petit microbe, sans même besoin d'un crobe entier. La dérive de notre alimentation est au premier chef de cette dérive sanitaire globale. Nous en avons déjà parlé : des aliments avec toujours moins de vitalité parce que toujours plus industrialisés ou provenant de l'autre bout du monde, cueillis avant maturité avec force pesticide et conservateur. A cet égard, des normes de sécurité alimentaire sont effectivement nécessaires pour éviter un empoisonnement de masse. Mais la bureaucratie s'en est trop mêlé, l'internationalisation aussi, les instances européennes et j'en passe, et la petite bergerie de montagne qui a fourni des fromages plus nauséabonds qu'un putois incontinent à des générations de centenaires a fermé ses portes, faute de conformité sanitaire.
Et le développement des produits ménagers désinfectants pour aseptiser notre domicile n'y est pas étranger non plus. A force de faire la chasse à la vie invisible autour de nous, notre corps finit par ne plus savoir y faire face. Comme quoi, la quantité de détergents et de javel qui part dans les canalisations n'est pas qu'un problème environnemental. Ces produits impactent aussi notre santé dès leur utilisation.
Il y a urgence à faire évoluer les mentalités sur tous ces points. Il y a urgence à repenser tous ces gestes et toutes ces normes pour discerner entre ce qui est utile et constructif sur le long terme, et ce qui nous coupe toujours plus de la nature sans laquelle nous ne pouvons pas vivre pleinement. A ne pas savoir accepter la mort de quelques uns de temps en temps, selon l'ordre naturel des choses, on en vient à mettre tout le monde en danger. Il y a urgence à promouvoir une politique de santé à la source. Et ça allègera à terme le besoin en aval d'une politique de la maladie. Mais cela passe par une prise de conscience de la société dans son ensemble. Et une responsabilisation individuelle.

Quidam :
Par contre, à court terme, le problème de la sécu reste entier.

PG :
Certaines tendances lourdes ne peuvent effectivement pas se solutionner du jour au lendemain. Mais il y a quand même des mesures qui peuvent être prises à court terme. La mise en place du contrôle des diagnostics et des prescriptions par la sécurité sociale en est une, histoire de cesser de rembourser des examens inutiles ou des excès de médicaments. Il faut pour cela qu'elle se dote d'un organe de contrôle suffisant en taille pour traiter le volume des prescriptions, mais aussi que celui-ci soit compétent pour apprécier voire questionner les diagnostics et leur traitement. Et dans une logique de responsabiliser les gens à leur santé et à leur consommation médicale, pourquoi obligatoirement rajouter le coût d'une consultation chez le médecin traitant avant d'aller voir un spécialiste ? Si le patient va en voir un à mauvais escient, alors qu'il en assume le coût en n'étant pas ou mal remboursé. S'il n'est pas sûr, alors effectivement, il est logique de consulter d'abord un généraliste.
Par ailleurs, le médecin traitant est supposé centraliser le dossier médical d'un patient et est rémunéré par la sécurité sociale pour ce faire. Mais c'est un service informatique central et national qui doit le centraliser. Pour que n'importe quel médecin que vous allez voir n'importe où dans le pays puisse y accéder, par exemple en vous faisant simplement saisir un code personnel pour lui en donner le droit, à moins d'intégrer ce droit d'accès dans une carte d'identité électronique et polyvalente intégrant la fonction carte Vitale, pour en finir avec le gaspillage de la multiplication inutile des supports. Et il faut prévoir un droit d'accès même sans code personnel pour les services d'urgences amenés à traiter un patient inconscient mais identifié, afin de s'éviter à chaque fois nombre d'examens qui ont déjà été faits tels que le groupe sanguin, les allergies à certains médicaments, etc. Ne serait-ce pas infiniment plus efficace collectivement ?

Quidam :
Mais en fait, un tel principe existe déjà et est en test dans certaines régions sur la base du volontariat des patients.

PG :
Comme quoi, une idée n'atterrit jamais dans un seul cerveau à la fois. Et je suis heureux d'apprendre que des personnes en charge de la gestion de la Sécurité Sociale s'en soient emparées. Mais je regrette que ce soit limité au volontariat et à certaines régions seulement. A titre de test, dites-vous ? Pour tester quoi ? Le bon fonctionnement informatique ? Encore cette politique de faire un pas en avant et un en arrière parce qu'on n'est pas sûr de ce qu'on fait. Alors qu'il faut au contraire généraliser rapidement l'usage de cet outil essentiel pour bien gérer ce domaine très sensible, tant de par son impact sur la santé des citoyens que de par l'importance des ressources collectives qui y sont dédiées.
Avec un tel outil qui augmente considérablement la visibilité du système, il peut ensuite bien plus facilement y avoir un réel renforcement de la chasse aux abus et à la fraude, qui sont un poids très important dans nos comptes de santé publique. Entre les sans-papiers qui se font soigner sur le compte de quelqu'un d'autre, l'immigré unijambiste à qui la sécu a payé une prothèse et qui va la vendre dans son pays d'origine pour payer ses vacances en famille, les fausses prescriptions alimentant les trafics de médicaments, etc., il y a de quoi faire pour réduire les fuites.
Et puis il y a aussi les abus légaux dont il convient de se préoccuper en modifiant les règles de prises en charge. Par exemple en réservant le remboursement des actes médicaux aux résidents légaux du pays. Un exilé fiscal qui part en Suisse pour payer moins d'impôts mais revient en France pour se faire soigner, c'est quand même très abusif. Un retraité qui va vivre à l'étranger, y paye ses impôts et y dépense sa retraite, mais qui revient au pays quand il a besoin de soins, c'est aussi se moquer du monde. Et même les immigrés illégaux ont droit à des soins gratuits aux frais du contribuable ! Si vous n'habitez pas en France, si vous n'y contribuez pas à la vie de la société, si vous vous y trouvez illégalement, il ne faut tout de même pas espérer qu'elle vous prenne en charge. Pour le moment, le système le permet parce qu'il est très mal conçu et laisse la porte ouverte à de nombreux abus. Mais on ne peut reprocher à certains d'être plus malins que le législateur, même si c'est moralement critiquable. Si ça nous déplait, à nous de changer la règle.
Et puis, il y a aussi des mesures de responsabilisation, qui me semblent nécessaires, tant humainement que financièrement. La première est de faire en sorte que les gens soient concernés par le tarif pratiqué par leur médecin. Au lieu, comme actuellement, de payer aveuglément parce qu'on sait qu'on va être remboursé, quand il n'y a pas carrément une dispense d'avance de frais et paiement direct par la sécu. Avec vos autres prestataires de service, que ce soit un maçon ou un plombier, vous vous préoccupez à l'avance de savoir si la facture vous convient ou pas. Eventuellement, vous négociez. Mais qui fait ça avec un médecin ? De très rares personnes, essentiellement d'ailleurs lorsqu'elles n'ont pas de mutuelle complémentaire.

Quidam :
Difficile de négocier avec un spécialiste où il faut six mois d'attente pour avoir un rendez-vous !

PG :
C'est très juste. Mais négocier ne veut pas dire que les prix vont forcément baisser. Le tarif de convention de la Sécurité Sociale n'est qu'une base maximale de remboursement, pas un tarif imposé. Car s'il y a six mois d'attente pour certains spécialistes, ce qui les met en position de force pour imposer leur prix, c'est surtout signe qu'ils sont trop peu nombreux et donc signe que les tarifs pratiqués ne sont pas suffisamment attractifs pour disposer des compétences dont la société a besoin. Et c'est pourquoi nombre d'entre eux pratiquent des honoraires libres bien supérieurs au tarif de convention. Ce qui est normal, car avec un système qui laisserait à l'administration le soin d'imposer un tarif légal maximal, ce serait la garantie du nivellement par le bas. Déjà que c'est un peu le cas…
D'ailleurs, nombre de grands spécialistes émigrent outre-Atlantique où leurs talents sont bien plus lucrativement valorisés. Le système hospitalier français ne fonctionne même que grâce à une exploitation éhontée des internes. Comment reprocher, alors que la formation gratuite que leur dispense la société n'est même pas assortie d'une clause de dédit-formation, que certains soient tentés de rentabiliser l'investissement de toutes ces années d'études et d'exploitation en partant dans des pays leur offrant plus de reconnaissance ? Et il en va de même pour les infirmières, sages-femmes, etc., qui travaillent dans des conditions que l'administration fustigerait sévèrement dans des entreprises d'un autre secteur et peuvent facilement trouver mieux dans d'autres pays où la formation médicale française est très appréciée.

Quidam :
Mais vous noircissez le tableau. Il y a aussi des pays où c'est bien pire. Et du coup, leurs médecins sont intéressés à venir chez nous.

PG :
Bien sûr. Dans de nombreux pays, mieux vaut avoir une vocation humanitaire, voire sacerdotale, pour se motiver à soigner quasi gratuitement les gens. Mais du point de vue de notre société, ça ne change rien. Et chercher à remplacer les compétences que nous perdons en en important d'autres, n'est pas franchement l'objectif. Les compétences formées doivent l'être pour les besoins de notre société en premier lieu. S'il y a du surplus qui profite au reste du monde, tant mieux. S'il y a déficit, il faut se donner les moyens d'en former davantage. Mais si ce déficit provient de la fuite des compétences que nous formons et qu'il faut recruter à l'étranger en compensation, ça ne peut pas aller.
Alors il faut que le système de rémunération des médecins les motive, les incite à rester en France, à s'installer là où il y a besoin d'eux y compris si c'est dans la campagne profonde, mais aussi à dispenser des soins de qualité. Que le médecin passe une demi-heure avec vous ou dix minutes, c'est le même prix. N'est-ce pas totalement illogique ? Ne faut-il pas intégrer aussi dans sa rémunération, pour partie du moins, le temps qu'il vous consacre ? Une première visite pour établir le diagnostic d'un problème n'a-t-elle pas naturellement vocation à prendre plus de temps et justifier une meilleure rémunération que la suivante où cinq minutes suffisent pour constater qu'un médicament n'a pas l'effet escompté et le remplacer par un autre ? Actuellement, le médecin qui expédie les consultations à la chaîne est favorisé en gagnant plus, et est donc encouragé à bâcler son travail. Et puis lorsqu'il vous laisse poireauter plus d'une heure dans la salle d'attente parce qu'il est incapable de gérer son agenda et considère que votre temps ne vaut rien, si vous aviez davantage votre mot à dire sur sa rémunération, vous auriez un levier pour l'inciter à plus de considération pour sa clientèle. Si vous n'êtes pas satisfait du travail de votre plombier, vous le lui faites sentir au moment du paiement. Pourquoi pas là ?

Quidam :
Mais comment faire ça sans laisser à charge des gens une partie au moins de la consultation ?

PG :
Eh bien je ne vois pas tellement d'alternative à ce que vous venez de dire. Il faut mettre en place un système responsabilisant, et cela ne peut passer que par laisser à charge des patients une partie du coût de leurs soins, donc des consultations, examens et médicaments. Par exemple en limitant le remboursement à 50% du tarif de convention de la sécurité sociale, mais en instaurant un plafond annuel de non- remboursement. Au-delà de ce plafond, la prise en charge passe à 100%. En fait, pour s'éviter les problèmes d'ajustement éventuel de ce plafond, il faut l'indexer sur le minimum social que définira la société. Ce plafond annuel de non-remboursement peut alors être d'une fois le montant mensuel de ce minimum social pour un adulte, et de la moitié seulement pour un enfant.
Un tel plafond est d'ailleurs bien inférieur à ce que ne dépensent bien des gens en futilités de type téléphonie portable, abonnement télé, ou cigarettes, et rendra au passage peu utile d'avoir une complémentaire santé puisque le risque financier annuel devient de facto plafonné. Et comme une telle complémentaire aurait pour effet d'annihiler les effets de cette mesure, il faut même prévoir d'exclure du plafonnement les gens choisissant néanmoins d'en souscrire une. Ce qui impliquera de développer un contrôle vis-à-vis de ceux qui seraient tentés d'en souscrire une à l'étranger, mais d'autres dispositions, allant de pair avec la lutte contre le travail au noir, rendront ça très aisé.
Désolé si cette mesure coupe l'herbe sous le pied du business très lucratif que constituent ces mutuelles, mais au moins, avec un tel dispositif, tout un chacun sera davantage responsable de sa santé autant que de ses soins. Votre exigence de qualité et de résultat sera plus affirmée, simplement parce que vous en voudrez pour votre argent. Il est malheureux que l'aiguillon de stimulation de la conscience se situe pour beaucoup au niveau du portefeuille. Mais puisque c'est une réalité, il faut faire avec. Et à partir du moment où la société doit par ailleurs être organisée pour que nul citoyen ne soit laissé sans un minimum vital, le débat sur les gens qui n'ont pas les moyens de simplement contribuer au coût de leur consultation chez le médecin ne trouve pas à s'appliquer puisque tout le monde pourra, même si au besoin en se privant d'un peu de superflu, assumer ce plafond annuel laissé à leur charge.
Il va de soi qu'il conviendra de faire des simulations plus précises pour valider les chiffres que je pose ici un peu au hasard, même si intuitivement ils me semblent assez proches de la réalité. Le but ici est avant tout de poser des pistes et des principes. Le gouvernement, toujours en manque d'imagination et nommant des ministres apparemment incapables de se pencher par eux-mêmes sur des solutions parce que plus politiciens qu'experts de leur domaine, a d'ailleurs récemment reçu sur le sujet un rapport, dont je préfère ne pas savoir le coût, qui fait état entre autres de certaines des pistes que j'évoque, comme de prendre en compte le temps de consultation dans la rémunération de celle-ci. Quelles mesures concrètes en découleront, nous verrons bien. Mais il est clair qu'il faut une réforme en profondeur du mode de rémunération des médecins, afin que celui-ci soit responsabilisant autant pour les praticiens que pour leurs patients.

Quidam :
Il me semble avoir entendu dire qu'en Chine a été mis en place un système où un médecin est responsable d'un certain nombre de patients et est rémunéré aussi en fonction de la bonne santé de ceux-ci.

PG :
J'ai souvenir d'avoir entendu quelque chose comme ça aussi. Mais cela ne peut s'appliquer que si les patients n'ont pas le choix de leur médecin et qu'un médecin n'a pas non plus le choix de ses patients, ni de la zone dont il est responsable. Impensable chez nous. Néanmoins ce principe constitue une piste à explorer. Car à quoi sert le principe du médecin traitant s'il n'a même aucune incitation à ce que ses patients soient en bonne santé ? Au contraire, notre système le récompense de la mauvaise santé des gens. Comment voulez-vous dès lors que les comptes de la sécu s'améliorent ?
Mais en même temps, il ne peut être derrière chaque patient pour les empêcher de mal manger et de se rendre malade de diverses manières. C'est pourquoi aucune solution ne pourra être trouvée sans responsabilisation des patients vis-à-vis de leur propre santé. Par exemple, si vous passez votre temps à manger des chips et à boire des sodas puis développez un diabète, le médecin n'y pourra pas grand chose. La question est donc délicate.

Quidam :
Oui, se développerait inévitablement le problème de déterminer le degré de responsabilité du patient dans sa maladie.

PG :
Et comme le diabète, pour rester sur cet exemple, peut avoir des causes assez diverses, j'imagine déjà les procès avec bataille d'experts se contredisant, etc. Alors ce principe chinois est une fausse bonne idée chez nous. Mais je pense qu'il représente plutôt un axe de réflexion à adapter à notre situation.
Cependant, il y a des cas bien plus évidents et sur lesquels nous pourrions déjà commencer à nous pencher. Lorsque vous vous rendez sciemment malade ou prenez un risque inconsidéré, il me semble anormal d'espérer que tout le monde se cotise ensuite pour vous prendre en charge. Si vous avez passé votre vie à fumer et développez un jour un cancer de la trachée ou des poumons, je suis désolé, mais je n'ai pas envie de payer pour vous. Si vous n'avez pas su vous abstenir d'abuser de l'alcool et finissez avec une cirrhose du foie, je n'ai pas non plus envie de payer pour vous. La responsabilisation, c'est aussi apprendre à récolter ce que l'on sème. La parabole du fils prodigue nous enjoint d'ouvrir la porte au repentant, pas de payer ses dettes à sa place. Mais à aujourd'hui, tout est fait pour effacer votre responsabilité. Qu'est-ce que ça enseigne aux individus sinon l'irresponsabilité et l'inconséquence ?

Quidam :
Vous parliez tout à l'heure du droit aux soins, mais là vous le bafouez. Et puis peut- on accepter que ceux qui en ont les moyens puissent se soigner, tandis que d'autres ne le pourront pas ?

PG :
Ah, encore l'éternel débat sur l'injustice sociale. Et oui, le monde est injuste. Car le monde n'est pas égalitaire. Il faut s'y faire car c'est la diversité qui en fait la richesse, même s'il ne s'agit pas là de richesse financière.
Pourquoi devrais-je avoir pitié de celui qui n'a pas les moyens de se payer des traitements à deux mille euros par jour dans les centres anticancéreux alors qu'il a, sa vie durant, dépensé son argent à enrichir des empoisonneurs ? Il n'avait qu'à économiser. Et ça lui aurait aussi économisé son cancer.
Vous vous souvenez de La Fontaine ? « Vous chantiez ? Eh bien dansez maintenant ! » C'est trop facile de faire tout et n'importe quoi en comptant sur les autres pour compenser vos bêtises. Alors qu'en parallèle, ceux qui ont besoin de lunettes, d'une prothèse auditive ou d'implants dentaires, ce qui est le cas de beaucoup de gens qui n'ont ni sciemment dégradé leur vue en regardant la télé à vingt centimètres de l'écran pendant toute leur enfance, ni fusillé leurs tympans à coups de concerts rocks ou de baladeurs trop puissants, ni bousillé leurs dents à grands renforts d'excès de sucreries, eh bien ces membres-là de la société constatent, au vu des misérables remboursements qui leur sont proposés, que la solidarité sociale n'est pas si évidente que ça, car teintée d'une sélectivité qui défie la logique et qu'il importe de rectifier rapidement.
La société existe pour que ses membres s'aident les uns les autres à faire face à l'adversité. Mais mettre à charge obligatoire de tous les bêtises de certains, là, c'est biaiser le contrat initial et créer de l'injustice. Protéger ses membres, c'est aussi les protéger contre les errements d'autrui. Et donc y compris contre les conséquences financières de leurs errements volontaires.
Et puis, il y a aussi les considérations éducatives : si le but de l'humain est d'évoluer vers son accomplissement, cela nécessite qu'il apprenne le sens de la responsabilité de ses actes. En favorisant cet apprentissage, la société favorise l'évolution personnelle de ses membres. En s'apitoyant, elle y contrevient. « Qui aime bien châtie bien », dit-on. C'est une formulation courante du principe que l'amour doit savoir être cruel lorsque c'est pour le bien de l'autre. Et ce n'est pas le lionceau chassé de la mamelle maternelle à coups de griffes et de crocs une fois sevré qui va attester du contraire. L'apparente cruauté de sa mère à ce moment précis est nécessaire pour qu'il passe de l'enfance à l'adolescence.


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